3e Avent (12/12 - 5e command. 2 guerre)

Homélie du 3e dimanche de l’Avent (11 décembre 2022)

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Le 5e commandement (2)

  1. Le respect de la dignité des personnes
  1. Le scandale

Le scandale est le comportement qui porte autrui à faire le mal, se faisant le tentateur de son prochain. En portant atteinte à la vertu et à droiture par le mauvais exemple, comme des loups déguisés en agneaux (Mt 7, 15), il risque d’entraîner son frère dans une faute grave et donc à la mort spirituelle de l’enfer. Il est aggravé par l’autorité de ceux qui le causent (les parents, enseignants, clercs) ou de la faiblesse de ceux qui le subissent. Le Seigneur maudit même, comme il le fait rarement : « Qui scandalise un de ces petits, il vaudrait mieux pour lui qu’on l’ait précipité dans la mer avec une pierre au cou ! » (Mt 18, 6 ; 1 Co 8, 10-13).

Mais il arrive que le scandale soit provoqué par la loi ou par les institutions, par la mode ou par l’opinion. Jean-Paul II parlait de structures de péché. Cela concerne tous ceux qui contribuent à la dégradation des mœurs et à la corruption de la vie religieuse (politiques, media), ou à des «  conditions sociales qui, volontairement ou non, rendent ardue et pratiquement impossible une conduite chrétienne conforme aux commandements » (Pie XII). Idem pour les entreprises incitant à la fraude, des maîtres exaspérant les enfants (Ep 6, 4 ; Col 3, 21). Tout ce qui relève de l’abus de pouvoir au sens large : qu’on pense à ces évêques ou supérieurs religieux qui ont contribué à un climat tel que leurs subordonnés n’ont plus vu d’autre échappatoire que le suicide par ex. « Il est impossible que les scandales n’arrivent pas, mais malheur à celui par qui ils arrivent » (Lc 17, 1).

  1. Le respect du corps et la santé

La vie et la santé physique sont des biens précieux confiés par Dieu dont nous devons prendre soin raisonnablement. La société doit pourvoir aux besoins pour atteindre la maturité : nourriture et vêtement, habitat, soins de santé, enseignement de base, emploi, assistance sociale. Toutefois, la vie corporelle n’est pas une valeur absolue car le monde néopaïen promeut le culte du corps, et idolâtre la perfection physique et la réussite sportive. Lorsque s’approche le terme naturel de la vie, comme la mort ne doit pas être un tabou pour un vrai chrétien, il est du devoir moral de s’y préparer et les proches veilleront à ce que les malades reçoivent en temps opportun les sacrements qui préparent à la rencontre du Dieu vivant. Dans la Tradition, on repousse généralement à la toute fin l’extrême-onction qui fut avancée et devient très réitérable dans la nouvelle discipline (sacrement des malades). Mais il ne faut jamais surseoir à la confession, à n’importe quel âge ou état de santé car nous ne savons jamais ni le jour ni l’heure !

La vertu de tempérance évite toutes les sortes d’excès dans la nourriture, l’alcool, le tabac ou les médicaments. L’ivresse ou le goût immodéré de la vitesse mettent en danger autrui et soi-même. La drogue détruit la santé : sa production clandestine et son trafic sont scandaleux.

La recherche scientifique exprime la seigneurie de l’homme sur la création. Science et technique peuvent contribuer au développement intégral de l’homme et au bénéfice de tous. Cependant, elles ne sauraient indiquer à elles seules le sens de l’existence et du progrès humain (scientisme). La morale indique leur finalité et la conscience de leurs limites. Par ex. l’aide à la procréation est allée trop loin en dissociant l’acte sexuel de la procréation, à fabriquer un grand nombre d’embryons qui sont ensuite détruits ou servent à des fins d’expérimentation comme si c’était du matériel de laboratoire. L’expérimentation sur l’être humain est un péché si elle fait courir à la vie ou à l’intégrité physique et psychique des risques disproportionnés ou évitables. Elle requiert le consentement éclairé du sujet ou de ses ayants droits (ce qui n’était pas le cas avec le ‘vaccin’ du covid). La transplantation d’organes entre vivants (rein) ne pose pas de réel problème si les risques physiques et psychiques encourus par le donneur sont proportionnés au bien recherché chez le destinataire. Mais après la mort, sachant que comme pour le début de la vie, la médecine moderner entretient le flou, il me semble que l’Église l’a tolérée trop vite.

De même a-t-elle toléré trop vite l’incinération. L’Église ayant toujours enseigné le respect du corps des défunts qu’elle encense comme temples de l’Esprit Saint et loué l’ensevelissement des morts comme une œuvre de miséricorde corporelle (Tb 1, 16-18). Certes, elle pose comme condition que l’incinération ne manifeste pas une mise en cause de la foi dans la résurrection des corps (CIC, can. 1176, § 3), mais qui pourrait nier que c’est un des signes de la disparition de le foi dans le dogme de la résurrection des corps à la fin des temps ? Traditionnellement, l’Église rejetait ces pratiques comme outrage abominable ou châtiment (Gn 38, 24 ; Lv 20, 14 ; 21, 9 ; Jos 7, 15.25 ; Jg 14, 15 ; 15, 6) qui furent réintroduites par les libres-penseurs. De 1% la pratiquant en 1975, nous sommes passés à 39% en 2018 mais plus de la moitié l’envisagent actuellement. Il est triste qu’on ait modifié l’interdit en 1963 (privation de sépulture chrétienne dans le code de 1917, c. 1240 reprenant le décret du Saint-Office de 1886). Mais comme toujours, comme on ne creuse pas sur la foi ou non des mourants qui interdirait toujours la sépulture (c. 1184 si contre la foi), la tolérance est devenue règle et la recommandation préférant l’inhumation tombée aux oubliettes (c. 1176)

Les enlèvements, prise d’otages, terrorisme, la torture qui use de violence physique ou morale pour arracher des aveux, châtier des coupables, effrayer des opposants, satisfaire la haine sont des péchés graves, comme les stérilisations forcées (de plus en plus promues par l’ONU). Il est regrettable que l’Église eût cautionné l’usage de la torture dans les siècles passés dans la lutte contre l’hérésie.

  1. La sauvegarde de la paix
  1. La paix

Par le « tu ne tueras pas » (Mt 5, 21), notre Seigneur demande la paix du cœur et dénonce l’immoralité de la colère meurtrière et de la haine. La colère est péché mortel car ce désir de vengeance allant jusqu’à vouloir tuer ou blesser grièvement se distingue d’un louable désir d’imposer réparation « pour la correction des vices et le maintien de la justice » (II-2, 158, 1, ad 3). « Quiconque se met en colère contre son frère sera passible du jugement » (Mt 5, 22). La haine volontaire contrarie la charité. C’est un péché grave quand on souhaite à autrui délibérément un tort grave : « Eh bien ! moi je vous dis : Aimez vos ennemis, priez pour vos persécuteurs ; ainsi vous serez fils de votre Père qui est aux cieux... » (Mt 5, 44-45).

Le respect et la croissance de la vie humaine demandent la paix, qui n’est pas seulement absence de guerre ni équilibre des forces adverses (comme dans l’équilibre de la terreur durant la guerre froide). La paix ne peut s’obtenir sur terre sans la sauvegarde des biens des personnes, la libre communication entre êtres humains, le respect de la dignité des personnes et des peuples, la pratique assidue de la fraternité. Elle est « tranquillité de l’ordre » (S. Augustin, Civ. Dei, 10, 13), œuvre de la justice (Is 32, 17) et effet de la charité (GS 78, 1-2). Elle est le fruit de la paix du Christ, le « Prince de la paix » messianique (Is 9, 5). Par le sang de sa croix, il a « tué la haine dans sa propre chair » (Ep 2, 16 ; Col 1, 20-22), il a réconcilié les hommes avec Dieu et fait de son Église le sacrement de l’unité du genre humain et de son union avec Dieu. « Il est notre paix » (Ep 2, 14). « Bienheureux les artisans de paix » (Mt 5, 9). La non-violence (Gandhi, Luther King) s’inspire de l’évangile car le recours à la violence entraîne toujours ruines et ses morts (GS 78, 5). « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

  1. La guerre

À cause des maux et injustices qu’entraîne toute guerre, l’Église presse instamment chacun de prier et d’agir pour que la bonté divine nous libère de la servitude de la guerre (GS 81, 4) : « de la famine, de la peste et de la guerre délivre-nous, Seigneur ». Par contre, GS 79, 4 se fourvoie en croyant qu’une autorité internationale comme l’ONU puisse être une solution alors qu’elle relève d’idéologies incompatibles avec l’évangile, promouvant la culture de mort.

L’Église a toujours reconnu la possibilité d’une guerre juste pourvu que la légitime défense par la force militaire respecte ces critères, soumis au jugement prudentiel des gouvernants qui devraient servir le bien commun . Il faut que :

– le dommage infligé par l’agresseur à la nation soit durable, grave et certain.

– tous les autres moyens d’y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces.

– de conditions sérieuses de succès.

– l’emploi des armes n’entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer.

Les pouvoirs publics ont le droit d’imposer aux citoyens les obligations nécessaires à la défense nationale. Les militaires vertueux servent la sécurité et liberté des peuples, concourent au bien commun de la nation et au maintien de la paix (GS 79, 5). Les objecteurs de conscience doivent y participer autrement. Mais la morale demeure valable durant une guerre : il faut respecter et traiter avec humanité les civils, soldats blessés et prisonniers. Sinon, ce sont des crimes de guerre, évidemment péchés mortels comme l’extermination d’un peuple, d’une nation ou d’une minorité. Une obéissance aveugle ne suffit pas à excuser ceux qui s’y soumettent puisqu’il y va de l’objection de conscience (cf. Bx Franz Jägerstätter). Ainsi, on est moralement tenu de résister aux ordres qui commandent ces crimes.

La course aux armements sous prétexte de dissuasion n’assure pas la paix. Loin d’éliminer les causes de guerre, elle risque de les aggraver. Le gaspillage de richesses fabuleuses entrave le développement des peuples. La production et le commerce des armes touchent le bien commun des nations et de la communauté internationale et doivent être réglementés par les autorités publiques en évitant les intérêts privés.

Les injustices, les inégalités excessives d’ordre économique ou sociale, l’envie, la méfiance et l’orgueil qui sévissent entre les hommes et les nations, menacent sans cesse la paix et causent les guerres. « Dans la mesure où les hommes sont pécheurs, le danger de guerre menace, et il en sera ainsi jusqu’au retour du Christ. Mais, dans la mesure où, unis dans l’amour, les hommes surmontent le péché, ils surmontent aussi la violence jusqu’à l’accomplissement de cette parole : ‘Ils forgeront leurs glaives en socs et leurs lances en serpes. On ne lèvera pas le glaive nation contre nation et on n’apprendra plus la guerre’ » (Is 2, 4) (GS 78, 6).