19e Pentecôte (16-10 - invités à noce)

Homélie du 19e dimanche après la Pentecôte (16 octobre 2022)

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L’évangile des invités à la noce

  1. Les noces

Le roi célèbre les noces de son Fils. Dieu envoie Jésus Christ s’unir à toute l’humanité en assumant une nature humaine pour diviniser les hommes : « Dieu, donne au roi tes pouvoirs, à ce fils de roi ta justice » (Ps 72, 1). L’œuvre du salut accomplie par Jésus-Christ sur terre est classiquement comparée à une noce. Le mariage tient une place à part parmi les sacrements car unique à préexister au jardin d’Eden tout en demeurant après la chute. Le premier miracle dans la vie publique de Jésus intervint lors d’une noce à Cana (Jn 2, 1-11) et encore dans la vision finale de l’Apocalypse (21, 2) : « et la Ville sainte, la Jérusalem nouvelle, je l’ai vue qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, prête pour les noces, comme une épouse parée pour son mari ». Si l’Ancien Testament annonce cette réjouissance : la Sagesse a dressé une table, elle invite au festin (cf. Prov. 9, 1-6), on ne comprend que dans le Nouveau Testament l’identité de l’Époux. Le Christ est explicitement appelé tel par Jean le Baptiste qui ne se désigne que comme l’ami de l’époux ne voulant pas lui prendre sa place en dénouant ses sandales car Jésus (Jn 1, 27 ; 3, 29) mais le Christ le dit lui-même (Mt 9, 15).

Si le péché a séparé l’homme de Dieu, la rédemption devait l’unir de nouveau à Dieu, de la manière la plus intime qu’on puisse concevoir, non pas le lien d’un esclave à son maître ni même entre deux amis mais comme la relation de l’épouse et de l’époux. La première étape est son incarnation et sa naissance : l’humanité s’est alors unie à la divinité dans la personne du Verbe Divin. La seconde suivit sa mort sur la croix par laquelle le Christ a objectivement racheté l’humanité ainsi unie à Dieu. La rédemption s’applique subjectivement à chacun par le baptême et le pardon de ses fautes. Par la grâce de la filiation divine, le Verbe s’unit avec l’âme de l’enfant de Dieu. La troisième étape, est l’union définitive de l’Église et de l’âme avec l’Époux divin dans le ciel.

Tout le cycle de Noël a pour objet l’incarnation et la naissance du Christ, à la célébration d’un mariage. Pendant l’Avent, nous entendons l’ardent appel que l’Épouse adresse à son divin Époux. L’Épouse se prépare à sa venue. À Noël, l’Époux sortit de la chambre nuptiale (ps. 18) qu’était le sein de la Très Sainte Vierge Marie. À l’Épiphanie l’Église célèbre ses noces par l’antienne : « C’est aujourd’hui que l’Église est unie à son céleste Époux, car le Christ a lavé ses péchés dans le Jourdain ; les Mages accourent avec leurs présents aux noces royales et les convives se réjouissent du changement de l’eau en vin ». À la Chandeleur, nous chantons : « Orne ta chambre nuptiale, Sion, reçois le Christ, ton Roi... ». Tout le cycle de Noël est donc une célébration des noces du Christ avec l’Église.

  1. L’invitation pressante

L’invitation fut lancée en deux grands moments. D’abord aux invités de choix qu’étaient les Juifs, membres du peuple élu. Les serviteurs étaient les patriarches, juges, rois et prophètes. Lorsque les citoyens de la ville eurent dédaigneusement décliné l’invitation, le roi envoya chercher tous ceux qui se trouvaient aux carrefours, les mauvais comme les bons ; et la salle fut remplie. C’est là le symbole de la réprobation des Juifs et de la vocation des païens.

Après le cycle de Noël commence, dans l’Église, un temps empreint de gravité. Pendant l’avant-carême, ses messagers et ses gardes se tiennent aux carrefours des chemins et adressent l’invitation aux noces (les ouvriers de la vigne). L’Église appelle au catéchuménat et à la pénitence. Le carême commençant, l’unique souci porte sur la robe nuptiale. Pour une partie des invités, elle doit être tissée (enfants à baptiser) ; pour les autres, elle doit être lavée (pénitents). Le jeudi saint, nous quittons avec les pénitents les vêtements de pénitence et nous recevons de nouveau la robe nuptiale/ À la veillée de Pâques, les catéchumènes reçoivent la robe nuptiale immaculée et nous la recevons avec eux. Le prêtre dit : ‘Reçois la robe blanche et porte-la sans tache au tribunal de Dieu’. A Pâques, la salle du festin est remplie. Les invités sont tous assis là, revêtus de la blanche robe nuptiale.

  1. Le jugement

Mais le roi arrive pour rendre visite aux invités, figurant le retour final du Seigneur. Mais  s’il est pour chacun à l’heure de la mort, il sera pour tous au jugement dernier. Seul, alors, sera reçu celui qui sera trouvé revêtu de la robe nuptiale de la grâce baptismale ; quiconque en sera dépourvu entendra de la bouche de l’éternel Juge l’arrêt de condamnation.

Le temps pascal jusqu’à la Pentecôte est l’heureux temps de la filiation divine ; la blanche robe nuptiale est alors dans tout son éclat et préservée de toute atteinte. A la Pentecôte, les baptisés sont déclarés majeurs et envoyés dans le monde extérieur. Puis commence la dernière partie de l’année liturgique, le temps après la Pentecôte qui est le temps où l’Église se préoccupe de sauvegarder la pureté de la robe nuptiale. Chaque dimanche, l’Église évoque le baptême et la fête de Pâques. Chaque dimanche, elle purifie, à l’Asperges, la robe nuptiale. À la messe dominicale, l’Eucharistie est le grand moyen de préservation et de purification de la robe nuptiale (mundet et muniat). Inlassablement l’Église avertit les chrétiens d’avoir à dépouiller le vieil homme et à se revêtir de l’homme nouveau dans la justice et la sainteté, et prie à cette intention. Mais, à partir du 17e dimanche après la Pentecôte, l’Église porte un regard de désir et d’attente sur le retour du Seigneur. Elle va, en habit de pèlerin, comme une étrangère, à travers le monde et veille à ce que la lampe soit garnie d’huile pour attendre le moment où le Seigneur viendra aux noces. Actuellement, le grand souci de notre mère l’Église est que ses enfants se présentent sans faute et sans châtiment à la venue du Seigneur.

Conclusion

L’année liturgique se retrouve dans notre parabole. Mais aussi les trois phases principales de la vie du chrétien : les noces sont l’œuvre de la rédemption que nous voulons nous appliquer. La robe blanche est la grâce de la filiation divine que nous voulons garder en observant les commandements. Notre fin est le retour du Seigneur qui se présente à nos yeux comme le but essentiel de notre vie, et que nous pouvons, par la miséricorde divine, anticiper à chaque messe. Ainsi comprenons-nous mieux que saint Paul compare la sainteté du mariage, indissoluble comme l’union de l’humanité à la divinité, cette petite goutte d’eau mêlée au vin à l’offertoire que Dieu veut avoir pour lui afin de nous enivrer de son vin nouveau au Paradis.