Christ-Roi (30/10/22 - 1er commandement)

Homélie du Christ-Roi (30 octobre 2022)

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Le premier commandement

Puisque cette fête veut honorer la royauté sociale du Christ, voyons qu’elle s’enracine sur les dix commandements. Lorsqu’on les évoque, on pense plus rapidement à « Tu ne tueras point » ou « Tu ne voleras point » car notre époque est gangrenée par le l’horizontalisme. Même Paul VI prétendait que l’Église aurait le « culte de l’homme ». Non ! Réaffirmons d’abord et avant tous les droits de Dieu et nos devoirs envers lui. La première table de la loi rassemble les trois premiers commandements divins dont le premier est : « Je suis le Seigneur ton Dieu : tu n’auras pas d’autre Dieu en ma présence ».

  1. De la vertu de religion à la vertu de charité
  1. Rien n’est aimé qui ne soit d’abord connu

Tout homme est créé pour le vrai, le bon, le beau. Il a le devoir moral, s’il ne veut pas perdre sa dignité et se rabaisser au rang des animaux, de rechercher la vérité et d’y adhérer. Cela seul rend hommage à sa liberté et non pas d’adhérer à de faux biens. « Je suis le Seigneur ton Dieu » impose une inégalité, une dissymétrie. Oui, nous sommes inférieurs à Dieu. Il est éternel, nous sommes mortels. Il est incréé et Créateur du Ciel et de la Terre et nous sommes créés. Il est parfait et nous sommes faillibles. Il est bon et nous subissons la concupiscence, cet aiguillon qui nous pousse à faire le mal. Il est fort et nous sommes si faibles.

La vertu de religion dépend de la vertu de justice qui rend à chacun son dû. À Dieu aussi elle rend l’honneur et le culte dû par tous les hommes. Ce culte doit être intérieur et extérieur. Intérieurement, par les facultés les plus élevées de notre âme : l’intellect par lequel on connaît Dieu et la volonté par laquelle on l’aime. Car il faut aimer Dieu quand on a reconnu tout ce qu’il fit pour nous. Ce culte passe par des cérémonies, gestes, objets sacrés car nous sommes une âme unie à un corps. Notre corps doit prendre sa part du culte, par exemple en étant agenouillé pour manifester que nous sommes petits devant Dieu qui seul est grand et bon. Nous ne touchons pas le corps du Christ en communiant car seules les mains consacrées du prêtre devraient le toucher. Mais il faut aller au-delà de la vertu de religion, vers la charité parfaite.

  1. Les vertus théologales

Tout ce qui tourne autour de Dieu relève des vertus dites théologales (qui viennent de Dieu et le concernent) : au nombre de trois : la foi, l’espérance et la charité. L’acte de foi est : « Mon Dieu, je crois fermement toutes les vérités que vous nous avez révélées et que vous nous enseignez par votre Église, parce que vous ne pouvez ni vous tromper ni nous tromper ». Nous devons d’abord à Dieu l’obéissance de la foi (Rm 1, 5 ; 16, 26) car il s’est révélé par les hauts-faits de l’élection et libération d’Israël de la maison de servitude en Égypte, symbole de notre esclavage au péché. La relation avec une personne vivante passe d’abord par la connaissance de l’être aimé. Il faut donc le côtoyer et le laisser nous enseigner de manière générique par la Bible, par le catéchisme et de manière spécifique, dans le « cœur qui parle au cœur » (S. John Henry Newman) qu’est la prière.

L’acte d’espérance est : « Mon Dieu, j'espère avec une ferme confiance, que vous me donnerez, par les mérites de Jésus-Christ, votre grâce en ce monde et, si j'observe vos commandements, le bonheur éternel dans l'autre, parce que vous l'avez promis et que vous êtes fidèle dans vos promesses ». Comme Dieu est bon, il daigne se pencher sur le rien que nous sommes qui a pourtant du prix à ses yeux puisqu’il a offert son Fils unique pour nous racheter au prix de son sang. Il prendra donc soin de nous par sa divine Providence.

L’acte de charité est : « Mon Dieu, je vous aime par-dessus toutes choses, de tout mon cœur, de toute mon âme et de toutes mes forces, parce que vous êtes infiniment bon et souverainement aimable, et j'aime mon prochain comme moi-même pour l'amour de vous ». On ne peut se contenter de le connaître sans l’aimer car seul l’amour répond dignement à l’amour. Cette vertu de charité est la plus grande des trois (1 Co 13, 13) car elle seule subsistera au Ciel. Voyant Dieu face à face si nous y sommes admis, nous n’aurons plus à croire en lui ni à espérer en lui car nous posséderons la vision béatifique qui nous rendra parfaitement heureux. Mais nous continuerons à l’aimer.

  1. Les péchés et vices opposés aux vertus
  1. Péchés contre les vertus théologales

Les vertus désignent un juste milieu entre deux extrêmes comme le courage ou force tient le juste milieu entre la lâcheté et la témérité. Seule les vertus cardinales dont la justice et la religion connaissent un excès ou un défaut car on n’aime jamais trop Dieu. Énumérons donc les péchés opposés pour mieux cerner cette réalité.

À la foi s’opposent :

  • Le doute volontaire néglige ou refuse de tenir pour vrai ce que Dieu a révélé et que l’Église propose à croire. Le doute involontaire désigne une hésitation à croire, la difficulté à surmonter les objections liées à la foi ou l’anxiété suscitée par l’obscurité de celle-ci. Il faut travailler à le surmonter.
  • L’incrédulité est négligence ou refus volontaire de donner son assentiment de la foi.
  • L’hérésie est le doute ou la négation obstinés, après avoir reçu le baptême, d’une vérité qui doit être crue de foi divine et catholique.
  • L’apostasie est le rejet total de la foi chrétienne (ceux qui prétendent se faire débaptiser).
  • Le schisme est le refus de la soumission au Souverain Pontife (le pape) ou de communion avec les membres de l’Église qui lui sont soumis.

On peut sûrement transposer Jules Romain dans Knock : « tout homme bien portant est un malade qui s’ignore » au catholique « tout catholique bien-pensant est un hérétique qui s’ignore ». On peut facilement éprouver la vraie foi sur trois pierres majeures d’achoppement que sont l’Eucharistie (le sacrifice de la Croix est rendu actuel par la présence réelle et permanente du Seigneur dans l’hostie consacrée qui mérite qu’on lui marque notre crainte filiale et amour par la génuflexion), la virginité perpétuelle de Marie (Incarnation par le miracle d’une conception de l’Esprit-Saint), les fins dernières (l’enfer existe et n’est absolument pas vide, très peu de gens évitent le Purgatoire à leur mort car ils n’ont pas assez expié ou mérité ici-bas). Par contre, ne croyons pas non plus que le moindre twit du Pape (ce qui veut dire crétin en anglais !) ou conférence dans un avion aurait une quelconque portée infaillible ! Il y aurait là crédulité.

Contre l’espérance, comme l’homme n’a pas les moyens de répondre à Dieu en tirant de son propre fonds, il doit tout attendre du Père éternel. Elle porte sur le Ciel et non pas sur Terre « je ne vous promets pas le bonheur en ce monde mais dans l’autre » précisait la Sainte Vierge à Lourdes à S. Bernadette. S’y opposent :

  • Le désespoir : l’homme n’espère plus de Dieu son salut personnel, les secours pour y parvenir ou le pardon de ses péchés (comme Judas qui se pendit alors que Pierre fit une triple profession d’amour pour racheter son triple reniement).
  • La présomption qui fait croire que l’homme pourra se sauver lui-même (pélagianisme) ou que Dieu pardonnera toujours sans réel conversion ni mérites de sa part.

Contre la charité, on pèche par :

  • L’indifférence qui néglige ou refuse de considérer la charité divine envers nous, méconnaissant sa prévenance ou déniant sa force.
  • L’ingratitude omet ou récuse la charité divine en ne rendant pas amour pour amour.
  • La tiédeur hésite ou néglige de répondre à l’amour, or Dieu vomit les tièdes (Ap 3, 16).
  • L’acédie (improprement appelée paresse spirituelle) ne trouve plus sa joie en Dieu et se détourne ainsi des choses divines, à commencer par la prière et les actes de piété.
  • La haine de Dieu provient de l’orgueil et maudit Dieu comme celui qui prohibe son péché et lui inflige des peines comme un juste roi.

  1. Péchés contre la vertu de religion

Nous devons adorer Dieu en le priant par la louange, l’action de grâce, l’intercession. Nous devons faire des sacrifices pour lui, tenir nos promesses et vœux envers lui. A fortiori, l’Église révère le chemin de perfection qu’est la vie religieuse qui émet des vœux publics ou privés de chasteté, pauvreté, obéissance. Adorer le Dieu unique évite la dispersion (zapping) si fort en notre siècle. Mais nous pouvons mal faire si nous tombons dans ces travers :

  • La superstition dévie le sentiment religieux en accordant trop d’importance à une pratique souvent rigoureusement respectées comme pour forcer Dieu à nous obéir.
  • L’idolâtrie rend à une créature le culte suprême dû à Dieu seul. Contrairement à l’iconoclasme condamné en 787 au concile de Nicée II, les images peuvent toutefois depuis l’Incarnation être vénérées car elles renvoient à Dieu seul saint. Les anges, saints ne sont pas adorés (culte de latrie) mais vénérés (culte de doulie) et même la Très Sainte Vierge, pourtant très haut, demeure une créature, mais la plus parfaite (hyperdoulie). Elle recoupe la condamnation du polythéisme et faux cultes du paganisme mais peut diviniser une personne (une ‘star’), un ange ou démon (satanisme) ou une réalité humaine comme l’argent (Mammon), le pouvoir, la race, l’État (statolâtrie du communisme et de ses dérivés nazisme et fascisme).
  • Divination et magie. Si Dieu révèle parfois l’avenir par ses saints, même des révélations officielles reconnues ne sont pas toujours avérées (La Salette, Akita) car le scénario décrit montrait à quoi on s’exposait si on ne faisait pas pénitence. Bien des mystiques parlent ainsi de restauration monarchique en France. On ne peut tomber dans le révélationisme. Ni dans le complotisme qui se réjouit presque de l’apocalypse d’où qu’elle vienne (après le covid, la menace nucléaire ou le transhumanisme) et qui tendrait à sidérer ou paralyser alors qu’il faut mobiliser nos forces contre le mal si prégnant. Chercher à connaître l’avenir par le spiritisme, la conjuration des esprits ou nécromancie (cf. sorcière d’En Dor, 1 Sm 28, 3-25), divination par l’horoscope, revient à se défier de Dieu qui prend soin de nous puisqu’il donne la nourriture aux oiseaux et vêt les lys des champs mieux que le roi Salomon (Mt 6, 26). Croire trop en la puissance des sortilèges (affaire Paul Pogba) et donc des démons revient à manquer de cette même confiance en Dieu qui a définitivement vaincu les forces du mal. Un exorcisme majeur finit toujours par aboutir. Attention aussi aux médecines alternatives (rebouteux, marabouts, prière contre le feu).
  • L’irréligion tente Dieu comme Satan incitant Jésus à se jeter au pied du Temple car elle fait douter de son amour, sa providence ou puissance.
  • Le sacrilège profane ou traite indignement les sacrements ou choses sacrées. Les ‘sœurs de la perpétuelle indulgence’ (sic) avec ses travestis à la gay pride offensent Dieu.
  • La simonie prétend faire commerce des choses spirituelles (acheter un sacrement, un charisme dont on n’est pas le dépositaire !) comme Simon le magicien (Ac 8, 20).
  • L’agnosticisme prétend que l’homme ne pourrait atteindre à la vérité en matière religieuse (inspiration kantienne de défiance des capacités de l’intellect pour atteindre les choses en soi).
  • L’athéisme est souvent matérialiste (marxiste) ou un humanisme qui fait de l’homme la fin et mesure de toute chose et n’envisage que l’aspect économique, social, environnemental. La religion serait « l’opium du peuple » (Marx) car détournant l’énergie des pauvres gens vers le bonheur de l’au-delà alors qu’il faudrait travailler à faire advenir le paradis dès ici-bas.

Certes, ne donnons pas de contre-témoignage dans l’Église qui puisse faire fuir les gens car le serviteur doit s’effacer pour laisser passer la lumière qu’est le Christ. Mais acceptons aussi de ne pas chercher à plaire aux homme mais seulement à Dieu (Ga 1, 10) en tenant l’intégralité de la foi. Nous devons témoigner mais sachant que « je ne suis pas chargée de vous le faire croire, je suis chargée de vous le dire » (S. Bernadette).