6e Pentecôte (09/07- 7 dons ES : science)

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La science

La science est le cinquième don de l’Esprit-Saint « par lequel nous apprécions sainement les choses créées, et nous connaissons la manière d’en bien user et de les diriger vers leur fin dernière qui est Dieu » (catéchisme de S. Pie X n°953).

      1. Le don de science dans la théologie de saint Thomas d’Aquin
  1. Un jugement sûr sur quoi croire : distinction d’avec l’intelligence

« La grâce est plus parfaite que la nature ; elle ne va donc pas se trouver en défaut dans le domaine où l’homme peut être parfait par nature. Or, lorsque l’homme par sa raison naturelle adhère en toute intelligence à une vérité, il est doublement perfectionné en face de cette vérité ; d’abord parce qu’il la saisit ; puis parce qu’il a sur elle un jugement certain. C’est pourquoi deux conditions sont requises pour que l’intelligence humaine adhère d’une manière parfaite à la vérité de foi. L’une est qu’elle saisisse sainement ce qui est proposé ; cela regarde le don d’intelligence. Mais l’autre est qu’elle porte un jugement sûr et droit en la matière, c’est-à-dire en discernant ce qui doit être cru. C’est pour cela que le don de science est nécessaire » (II-II, 9, 1).

Ce don de l’Esprit-Saint ressemble à et participe de la science divine, qui n’est ni discursive ni démonstrative ou raisonneuse comme la science humaine, mais intuitive (ad 1). Ceux qui possèdent ce don par grâce ont un jugement sûr des choses à croire et à faire, si bien qu’ils ne s’écartent en rien de la droiture de la justice : « Le Seigneur a conduit le juste par des voies droites et lui a donné la science des saints » (Sg 10, 10). La vies de saints nous enseigne autant par leurs discours et paroles que par leurs actes car ils vivent de la foi. La science s’entend soit comme un don offert à tous les croyants qui distingue quoi croire ; soit comme un charisme amenant les autres à croire et réfutant les contradicteurs (ad 2).

  1. La science porte sur les choses humaines : distinction d’avec la sagesse

La science implique une certitude dans le jugement mais due aux causes secondaires pour connaitre des créatures. Si cette certitude venait de Dieu, elle serait la sagesse (II-II, 9, 2). Pourtant, la science porte sur la foi et les choses divines. « Bien que les vérités de foi soient des réalités divines et éternelles, la foi elle-même est quelque chose de temporel dans l’esprit du croyant. C’est pourquoi il revient au don de science de savoir à quoi l’on doit croire. Mais savoir les réalités mêmes auxquelles on croit, en elles-mêmes et par une certaine union à elles, revient au don de sagesse. Aussi le don de sagesse correspond-il à la charité qui unit à Dieu l’esprit de l’homme » (ad 1).

La science est un don à la fois spéculatif et pratique. La foi est principalement une spéculation adhérant à la vérité première : l’homme sait ce qu’il doit tenir. Mais la vérité étant aussi la fin ultime qui règle notre agir, la foi s’étend secondairement à l’action : « La foi est agissante par la charité » (Ga 5,6) (II-II, 9, 3).

      1. Le don de science donne un juste rapport à l’autre
  1. La science aide à connaître les réalités inférieures

Le don de science connaît les créatures à leur juste mesure (P. Jean-Miguel Guarrigues). Souvent notre rapport aux autres va du mépris à l’exaltation mais se situe rarement dans un juste milieu. On passe ainsi rapidement de l’amour à la haine suite à une déception provoquée par l’être plus idolâtré que réellement aimé pour ce qu’il est. La science concerne les réalités créées, donc aussi les autres êtres humains pour établir un rapport juste avec elles.

Dieu, qui nous est supérieur, sera plus être aimé que connu. Il en sera de même pour les choses de rang égal comme nos prochains. Mais, pour les choses inférieures comme mon chien, il vaut mieux les connaître que les aimer. En effet l’amour, acte de volonté, me fait sortir de moi-même (centrifuge, extatique) pour rejoindre l’être aimé et lui être assimilé. En aimant Dieu, nous nous unissons à lui qui nous communique sa perfection divine. Alors que connaître fait entrer en nous l’autre (centripète, appropriation). En aimant, nous accédons à une réalité plus grande que notre appréhension toujours partielle de Dieu. Ainsi nous démultiplions nos potentialités. Mais il vaut connaître les réalités inférieures que les aimer puisqu’on peut les dominer plus parfaitement (I, 82, 3).

Quelquefois nous reprochons aux autres de ne pas être Dieu. Je ne peux pas prétendre que mon conjoint, parce que je l’aurais placé sur un piédestal, me comprenne parfaitement. Le don de science accueille l’autre tel qu’il est et non pas tel que nous le voudrions, donc avec ses échecs et ses fragilités, mais aussi avec ses talents et ses succès.

  1. « Bienheureux ceux qui pleurent, parce qu’ils seront consolés ».

« Le propre de la science est de juger comme il faut des créatures. Or, il y a des créatures qui sont pour l’homme une occasion de se détourner de Dieu : ‘Les créatures sont devenues une abomination, un piège pour les pieds des insensés’ (Sg 14, 11). Ces insensés n’ont pas sur les créatures un jugement droit, parce qu’ils estiment qu’il y a en elles le bien parfait, ce qui les conduit à pécher en mettant leur fin en elles, et à perdre le vrai bien. Ce dommage est révélé à l’homme lorsqu’il apprécie justement les créatures, ce qu’on fait par le don de science. C’est pourquoi on situe la béatitude des larmes comme répondant au don de science » (II-II, 9, 4).

« C’est en premier lieu l’affliction pour les erreurs passées, puis par voie de conséquence la consolation, lorsque, par le bon jugement de science, on ordonne les créatures au bien divin. C’est pourquoi, dans cette béatitude, on met comme mérite les larmes et comme récompense la consolation qui en est la suite. Consolation qui est commencée en cette vie, mais consommée dans la vie future » (II-II, 9, 4, ad 1).

Bien souvent un amour désordonné des choses, des personnes, nous éloigne de Dieu. Le Christ le rappelle : « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi ne peut pas être mon disciple » (Lc 14, 26-27). Les amours humaines ne sont pas des obstacles vers Dieu quand on avance dans la même direction avec les personnes, mais si elles devaient se mettre en travers de notre sanctification, le salut devrait avoir la prééminence, même sur les liens familiaux.

Date de dernière mise à jour : 16/07/2023